À quoi ressemblait le jeune Léonard ce personnage anticonformiste, connu et aimé dans l’Italie tout entière, l’immense génie qui fascine le monde entier depuis près de cinq siècles ?
Si l’on se réfère au récit de ses contemporains, il avait très belle allure, un corps bien proportionné, les yeux bleus, de longs cheveux et un visage d’ange.
Il était aussi, paraît-il, très avenant et tout ce qui émanait de lui en faisait un être extraordinaire.
Giorgio Vasari, peintre renommé ayant vécu quelques années après Léonard, et auteur de la première biographie des artistes de la renaissance italienne, a écrit que « la beauté de son aspect ne sera jamais suffisamment louée ». Mais pas seulement.
Il semble aussi particulièrement adroit dans les activités physiques, et dans le maniement des armes en particulier. En un mot, c’est l’exemple même de l’artiste de la renaissance : un homme pour ainsi dire parfait, dont le seul défaut semble avoir été une certaine inconstance.
Léonard né le 15 avril 1452 à Vinci, une petite ville toscane entre Florence et Pistoia. Fils naturel d’un notable de la région le jeune Léonard est à bonne école en Toscane qui est l’époque le centre de la vie politique, artistique, littéraire et scientifique.
Personne ne saura saisir les mettre à profit les enseignements de ses maîtres avec autant de génie lui.
Une vie d’expérimentation et de voyages
S’il est indéniable que la cité florentine permet en ces années de nombreux échanges avec les villes voisines, Léonard semble surtout fasciné par la nature.
Le fait que sa famille possède un moulin et des terres lui permet de battre la campagne en multipliant les expériences pour satisfaire son insatiable curiosité.
Il étudie les personnes, les animaux et les plantes, les phénomènes naturels et les corps célestes. Il observe tout cela avec la plus grande attention puis note ses réflexions dans ses carnets et y ajoute des dessins extrêmement détaillés.
Il gardera cette habitude toute sa vie. Au fil du temps, ces carnets formeront les fameux « Codex », si célèbre aujourd’hui.
Grâce à ses études sur les plantes, il peint des paysages avec la maîtrise du plus expert des botanistes.
Son attention pour le moindre mouvement et détail du corps des animaux lui permet de dessiner des chevaux saisissant de réalisme, mais aussi de fabuleuses figures d’hermines et de dragons.
Les secrets de la nature
Observer, étudier, puis raisonner pour essayer de saisir les secrets de la nature, c’est à peu près ce à quoi pourrait se résumer la méthode de Léonard de Vinci.
Ils privilégient systématiquement l’expérimentation sur la culture théorique.
Les études anatomiques de l’épaule par Léonard de Vinci Léonard de Vinci et l’homme de Vitruve Le croquis de son parachute tel qu’il apparait dans le Codex Atlantique Plans pour une machine volante (1488), Institut de France, Paris Léonard de Vinci – Machine volante, partie des ailes mécaniques – 1485-1488
Il n’aime pas étudier enfermé dans une bibliothèque et préfère l’aspect concret de l’expérience à l’abstraction des théories.
Plus tard, il regrettera cependant de ne pas avoir étudié le grec et le latin, nécessaires pourtant à tout homme de science de l’époque.
L’envie de voler
L’observation attentive des oiseaux sera le préalable nécessaire à ses projets de fabuleuses machines volantes.
Il se consacre aussi au phénomène aquatique, aux tourbillons et aux courants, qu’il compare à ceux de l’air dans le ciel.
Il semble passionné par ce qui est inaccessible à l’homme: voler.
Après avoir quitté Vinci en 1469, à l’âge de 17 ans, Léonard est apprenti à Florence dans l’un des ateliers d’art les plus réputés de la ville : celui de Verrocchio.
Il apprend vite ce qu’il aime : peindre, jouer de la lyre et chanter. Toutefois, rien ne semble pouvoir le distraire de l’observation du dessin et de ce qu’il appelle « dresser le relief » des choses.
En ces années, Laurent de Médicis fait battre à Florence le coeur de la culture de l’époque.
Des ateliers de la ville naissent des oeuvres d’art, des mécanismes complexes destinés à animer des grandes fêtes de la cour.
L’artiste…
Non seulement Léonard de Vinci peint, mais il invente aussi le projet de canalisations futuristes pour les eaux de l’Arno, imagine des moulins et autres constructions.
En 1482, Laurent de Médicis l’envoie à Milan à la cour de Ludovic le More.
Léonard a en poche une lettre de recommandation qui n’indique pas moins de 36 compétences diverses.
À Milan, il devient le maître d’oeuvre de cette somptueuse où ces machines complexes et merveilleuses rendent possible de fabuleux effets scénographiques et sonores.
C’est à la cour des Sforza qu’il peint quelques-uns de ses chefs-d’oeuvre : « La Dame à l’hermine, La Vierge aux rochers et La Cène ».
… et l’ingénieur.
Toutefois, au-delà des divertissements de la cour, Ludovic le More a besoin de ses services pour des questions militaires. Pour lui, Léonard conçoit des systèmes de fortifications et des ponts tournants, mais aussi de gigantesques arbalètes, des armes des machines de guerre qui permette de gagner une bataille en minimisant les pertes humaines.
Son projet de pont mobile permet d’attaquer, mais aussi et surtout de se ménager une retraite, et peut-être monté en emboîtant de simples pièces de bois, « sans le moindre outil, ni fer, ni cordage ».
De plus il suffit d’en retirer une seule pour que la construction entière s’effondre, coupant ainsi la route à l’ennemi.
Pendant ses 17 années à la cour des Sforza, Léonard se consacrait à l’ingénierie en réalisant des ouvrages hydrauliques, des fortifications et des machines volantes, sans pour autant négliger l’étude de l’anatomie de la peinture et de la sculpture, avec notamment un projet de portrait équestre monumental qui restera inachevé.
Un esprit toujours en mouvement
En 1499, l’armée française de Louis XII occupe le duché de Milan, Ludovic le More est contraint de partir et Léonard de quitter la ville.
Il commence par se rendre à Mantoue, auprès d’Isabelle d’Este (c’est une des cours les plus raffinées de l’époque), puis il se rend à Venise où il imagine un système d’inondation de la ville en cas d’attaque turque.
Il concevra même un modèle de scaphandre pour organiser la défense de la ville sous l’eau.
Ensuite, il retourne à Florence, la ville de sa jeunesse. Là, il se consacre aux mathématiques et à la géométrie, recommence à observer le vol des oiseaux, étudie le mouvement hélicoïdal où il reconnaît une des forces vitales de la nature, écrit ses Carnets de vol des oiseaux.
Il va jusqu’à formuler l’hypothèse de détourner le cours de l’Arno pour le rendre navigable jusqu’à la côte méditerranéenne.
En 1503, la réputation de Léonard est telle le gouvernement de Florence lui confie la charge de peindre une fresque dans la salle du conseil du palais vecchio, « La Bataille d’Anghiari », en souvenir de la victoire florentine en 1440.
Sur le mur d’en face, Michel-Ange doit peindre la « Bataille de Cascina ». Mais il ne finalise qu’une partie des cartons préparatoires de la fresque et quitte Florence pour retourner à Milan, toujours occupée par les Français.
En 1513, il se rend à Rome où la cour pontificale réunit un grand nombre d’artistes. Il se consacre à ces recherches et travaille sur plusieurs projets à la fois, l’assainissement de la plainte Pontine et le port de Civitavecchia, entre autres.
Trois ans plus tard, il quitte Rome pour la France où il est accueilli avec les plus grands honneurs : François Ier le tient en la plus haute estime, le comble de richesse et lui confie de prestigieux projets.
Léonard poursuit ses recherches, réalise les plans de châteaux et de palais, travaille à mille et un projets tout en continuant de peindre.
Il achève « La joconde », le tableau le plus célèbre du monde, dont il ne se sépare jamais, pas même en voyage.
Selon la légende, Léonard de Vinci s’est éteint dans les bras de François Ier : il meurt le 2 mai 1519 au Clos-Lucé, sa dernière demeure.
Léonard de Vinci et ses mystères
Léonard de Vinci ne sera jamais parti de cette organisation secrète, il connaît cependant l’alchimie et les principes de l’astrologie, comme la plupart de ses contemporains, Galilé et Kepler après lui.
Il y a donc rien d’étonnant à ce que ces travaux fassent référence au zodiaque et à l’alchimie : au moins en cela, Léonard ne se distingue en rien des hommes de son temps.
Pour connaître « en vrai » (comme il disait) les secrets de la nature, il pratique la dissection du corps humain, une trentaine de cadavres, dit-on d’hommes et de femmes d’âges différents.
Il étudie l’anatomie à Florence, ni à Pavie et à Rome dans l’ancien hôpital du Saint Esprit.
Afin de mieux conserver et étudier des organes aussi fragiles que les yeux, il va jusqu’à les faire cuire comme des oeufs durs.
Dans la ville du pape, on l’accuse de pratiquer la sorcellerie. S’il n’est pas jugé devant un tribunal, ni civile, ni ecclésiastique, face à l’hostilité ambiante, il est tout de même contraint de quitter la ville.
Grâce à ses recherches audacieuses, il fera évoluer la peinture et la représentation scientifique du corps humain.
Le mystère de la bicyclette
Le « Codex Atlantique » Haïti restauré dans le monastère de Sainte-Marie de Grottaferrata, entre 1962 et 1972.
En retirant la reliure, on a retrouvé le dessin reproduit ci-contre qui n’a pas manqué d’intriguer les chercheurs : on dirait le croquis d’une bicyclette tout à fait moderne.
Pourquoi était-il caché ?
Vraisemblablement parce qu’il était accompagné d’une esquisse un caractère licencieux. Mais les doutes demeurent, entre autre raison par le style du dessin qui n’est pas aussi soigné et raffiné que ceux dessinés par Léonard de Vinci. Qui a pu le faire ?
L’un de ses élèves, peut-être, qui aurait recopié ses études sur la transmission du mouvement par la chaîne. Toutefois, le dessin semble trop « moderne » pour ne pas éveiller les soupçons.
Sans oublier que, officiellement, la bicyclette n’a été inventé que vers 1880.
Sa manière d’écrire
Le plus grand génie de l’histoire italienne était gaucher et écrivait de droite à gauche parfois de manière spéculaire pour que personne ne puisse comprendre ses notes, ce qui a longtemps fait croire qu’il utilisait un langage codé, sachant que Léonard avait aussi l’habitude de remplir ses carnets à partir de la dernière page, à reculons en quelque sorte.
Il était aussi passablement désordonné et mélangeait souvent ses feuillets, parfois même en les disposant tête-bêche.
L’homme de Vitruve
Léonard a étudié de près la structure osseuse de l’homme et la musculature qui s’y attache, la circulation sanguine et le mécanisme articulaire.
L’anatomie et la physiologie le passionnent formidablement.
En 1489, il écrit « De la figure humaine », le premier traité sur les proportions du corps humain après celui de Vitruve, architecte de la Rome impériale, convaincu qu’un homme se tenant bras et jambes écartées s’inscrit parfaitement dans un cercle et un carré, soit les figures géométriques parfaites ; dans un cas comme dans l’autre, selon celui-ci, le centre du corps ne peut être que le nombril.
Or en dessinant « l’homme de Vitruve », l’un des dessins les plus célèbres du monde, Léonard de Vinci prouve que la figure humaine peut, certes, s’inscrire dans un cercle comme dans un carré, mais seulement à condition que les deux formes ne soient pas concentriques, car le centre du corps varie selon les cas de figure : c’est bien le nombril pour le cercle, mais il se situe au niveau du pubis pour le carré.
Ses machines époustouflantes
À Milan, Ludovic le More charge Léonard de la conception de fêtes destinées à émerveiller la cour, grâce à des automates et des effets scénographiques époustouflants rendus possibles par ses fabuleuses machines.
Mais le duc a aussi besoin d’armes ; ainsi, bien que pacifiste et aimant les animaux au point d’être végétarien, Léonard donne une autre preuve de son génie en concevant des machines de guerre totalement futuriste, ainsi que divers systèmes de fortifications et de défense.
Avec une incroyable avance sur son temps il conçoit des chars de combat pour protéger des soldats et permettre aux troupes de tirer sur l’ennemi tout en étant à l’abri ; une grande arbalète sur roulettes équipées d’un arc de 25 m pouvant lancer approcher de 50 kg ; des bombardes avec projectiles explosifs pour « semer chez l’ennemi une grande épouvante avec de graves dommages et confusion ».
Mais ce n’est pas tout. Il imagine une flotte entière de navires cuirassés typés de canon ; une catapulte gigantesque, mais très facile à actionner ; un bateau avec mouvement à pale pouvant être manœuvré par deux hommes seulement.
Il décide aussi les plans d’un pont tournant pour permettre le passage des bateaux, qui peut être actionné rapidement et par une seule personne ; une machine pour creuser et drainer la vase des canaux ; une sorte d’hélicoptère équipé d’une grande voile en spirale.
Il imaginait une machine pour le vol plané, un deltaplane manœuvré par un pilote et aussi une machine reproduisant le battement d’ailes des oiseaux.
Il dessine un parachute et note en marge de son croquis que l’homme « pourra se jeter de n’importe quelle hauteur sans le moindre dommage pour sa personne ».
Ainsi nous pouvons affirmer, sans la moindre hésitation que personne comme Léonard de Vinci n’aura su si bien se projeter dans l’avenir…
Bravo pour cette synthèse .
Je me permet de poser un lien vers mon diaporama « Révélation Léonard de Vinci », pour aller au-delà.